Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Chroniques de la souffrance, haine et pizzas.
20 mars 2013

Le rendez vous de la sachance

 

On s'était dit rendez vous dans vingt ans, en se foutant de la gueule de Patrick Bruel. Et tu veux que je te dise ? On n'aurait pas dû honorer une promesse qui venait d'un tube des années 90. Comment aurait-on pu prévoir ton début de calvitie ? Hein ? Pourtant avoir autant de cheveux à 20 ans, cela pouvait-il  être autre chose qu'une mauvaise blague de Dieu, ce facétieux ?
Comment aurait-on pu deviner que je n'aurai rien à dire ? A vingt ans, mon beau silence, on pouvait  le confondre avec du mystère. Aujourd'hui, ça fait juste ménagère ahurie qui ne met pas le nez plus loin que chez leclerc.
On ne pouvait pas savoir, nous qui nous croyions un peu plus qu'éternels que nous les aurions, ces fines rides au coin des yeux, ce menton un peu plus lourd, et surtout cet air civil et poli de tous les vieux, ceux qui parlent en chuchotant dans les endroits publics, sinon, on les enferme.  Parler fort en public après 25 ans, c'est juste un signe de psychose.  Tu veux que je te dise ? Vieillir, c'est ouvrir les yeux. C'est être soudain conscient qu'ils existent, ces autres- les serveurs, les vendeurs, les passants-  qu'on ne voyait même pas, et dont on ne soupçonnait même pas qu'ils nous entendent... A vingt ans, on était aveugles, bienheureux, bruyants et tout droits dans nos rangers, préoccupés par rien. L'Avenir, c'était la dernière piste du CD. La Question, c'était : "Lequel on met après ?"
On était là, assis bien en face, à se dire que polalala, on n'avait pas changé. Et pensant tout le contraire. Je me suis rappelée ce jour où tu avais essayé de m'embrasser à côté d'une boîte aux lettres . Et j'avais dit non non. Avec un air con.  Et on était rentrés dans mon studio de 15 m2 regarder un épisode des Mystères de L'ouest. Pendant vingt ans, j'y ai souvent pensé à ce baiser refusé, souvent, ces jours gris où je contemplais ma vie plutôt pas mal réussie et je ne comprenais pas la lourdeur de ma tristesse. Je pensais, encore que c'était les choix qu'on fait , ou ceux qu'on aurait du faire, qui déterminent notre capacité au bonheur. Je me disais "Et si..." tu vois. Avec des Et si, on déconstruit le monde en nous imaginant qu'il serait plus beau. Je ne savais pas que ça n'a rien à voir, que la vie n'est dictée par rien, que le malheur , la tristesse, c'est juste le point de départ.  Et la capacité au bonheur , juste celle de passer entre les gouttes, comme tu peux.

Je me suis rappelée ce jour de la boîte aux lettres ,  en voyant ta belle vie, plutôt bien réussie et tes yeux fatigués. Et je me suis dit Et si...hein et si ...eh ben tout aurait été exactement pareil. Et je t'ai vu, tu sais, me regarder en douce quand je me suis levée pour aller pisser , te dire la même chose . Exactement pareil.

Publicité
Publicité
Commentaires
B
(y'a un sacré niveau sur ce blog, et toi abz tu brilles...)<br /> <br /> (mais t'aurais dû le pécho quand même le mec)
A
voila qui me remonte le moral, assurément . Merci marielle (qui sache)
M
coucou ! ( juste pour faire un peu d'exogénité dans le blog de la cheftalité partagée...)(battez-vous, là)<br /> <br /> "Aujourd'hui, ça fait juste ménagère ahurie qui ne met pas le nez plus loin que chez leclerc." love... tu m'es une province et beaucoup davantage abz...
N
Putain c'est toi qui écrit les chansons de Patrick Bruel. Il les a touours refusey parce qu'il ne les comprend pas, alors qu'elles sont emplies de tendresse et de poésiey. C'est vrai que la fin est splendide, mais ce n'est pas une conclusion : c'est une CHUTE.
Y
Moi aussi j'adore. Et la conclusion est splendide je trouve.
Publicité
Chroniques de la souffrance, haine et pizzas.
Derniers commentaires
Visiteurs
Depuis la création 24 449
Publicité