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Chroniques de la souffrance, haine et pizzas.
8 mai 2013

feel like I'm knockin' on hell's door

 

Parfois,  je suis d'humeur téméraire  et   je me laisse inviter chez les gens. A un moment donné ou à un autre, entre le pastis et le fromage, toujours on doit se lever pour aller pisser. Et c'est là que ça commence, on a beau vous avoir dit la deuxième après la gauche du couloir au milieu, mais sur le côté, on ouvre toujours la mauvaise porte. Et c'est comme ça qu'on se retrouve face à ce qu'on appelle l'intimité d'une suite parentale. Ca me fait toujours un effet glacé, l'effet d'une mise en scène savamment orchestrée.
Les oreillers placés tendrement côte à côte quand on sait , nous,  que monsieur dort de puis des mois sur le canapé. Et quand bien même, cette condamnation au co-sleeping à perpétuité... D'où ça me vient cette angoisse ? d'une scène primitive mal refoulée ? Une jalousie aussi, peut être, pour tous ceux qui savent s'en contenter.
Parfois, je tombe sur le dressing et ça me donne immanquablement le sentiment de mon propre handicap que ce soit toujours si bien rangé.
 
Chez moi, si je laisse entrer quelqu'un , si j'ai pas trouvé un enième prétexte pour décommander, il n'y a rien à parcourir, on ne viole aucun secret. Tout est ouvert: les portes, les tiroirs, les volets.Tout porte (haha) à croire que je ne sais rien refermer.
Je m'en suis rendue compte hier en rentrant à mon domicile aux alentours de 17 h09, monsieur le commissaire.  J'ai eu un coup au coeur et senti mes jambes flageoler. J'ai cru qu'on m'avait cambriolée. Tout avait l'air d'avoir été visité, et très vite quitté. Les portes du buffet, les livres sur le canapé lui même complètement open, les KZ de mes placards et les pulls qui en dégueulaient,  le four (Edgar*), la machine à laver (Mike**) , les boîtes à médoc (25 mètres cubes à vue de nez) . Seul le frigo avait été épargné.
"C'est ça, je ne referme rien derrière, je suis un peu comme l'éternelle troussée" je me suis dit en vérifiant du coup ma braguette. C'est tout ce que je pouvais me dire en essayant de me souvenir si ce matin j'avais été particulièrement à la bourre (non, j'étais en avance, comme d'habitude)
Si tu viens chez moi, tu trouveras les chiottes sans t'égarer, sans te demander où ils peuvent bien être cachés, ces malpropres. J'ai la pudeur bizarrement placée.
 
Chez moi, j'ai vu comment c'était hier comme si je me rendais inopinément visite. C'est la maison d'une pressée, de quelqu'un toujours dans l'urgence, une qui fait que se dépêcher comme s'il fallait quitter la France sur l'heure pour cause de compte en Suisse (ou de judéité). Jamais le temps du recul, de la satisfaction d'avoir terminé et de la refermer la porte. Je ne sais pas pourquoi. Ca m'inquiète. Et parce que ma seule passion dans la vie , en ce moment, c'est d'enculer les mouches (on a les passions qu'on peut), j'ai réfléchi. Ca me bouleverse cette pulsion de l'ouverture, cette frénésie de l'embrasure, ce penchant fol envers l'issue.  Ca me fait mal de me voir comme une échevelée affolée qui s'en va avec une petite valise , avec des tiroirs eventrés derrière elle, comme une adèle H devastée. 
C'est un peu comme une conscience archaïque et mal articulée qu'à chaque instant, tout peut s'arrêter. Tout à l'heure -ou l'instant d'après-, c'est peut être la mort. Qu'est-ce qu'on en sait ? La fin, le neant aquatique (oui, j'ai une théorie et je pense qu'après la mort, nous devenons tous des poissons. La mort, c'est juste le retour à la préhistoire et ça me fait gravement flipper)
Alors, je ne veux pas perdre une seconde à me demander si j'ai bien ou mal fait, et si j'ai laissé rangé derrière, si je devrais le regretter, si c'était à refaire et comment j'aurais fait. Je ne veux pas perdre une nanominute à me demander si tu souffres plus , moins ou autant que moi de tout ce qu'on a si bien gâché. 
Mais je crois aussi que si les portes ne sont pas fermées, ça me donne cette stupide conviction qu'on a le droit de les franchir,  et que tu pourras toujours rentrer.
 
 
 
 
 
 
* A cause que c'est un Faure

** A cause que c'est une Brandt.

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Commentaires
N
J'ai la morue venez on fait un aioli, ça nous change des pizzas. Abz, tes notes sont toujours d'une tristesse infiniment belle.ça me rassure de savoir que tu es bordélique sur les bords.
K
Mais on t'a cambriolée ou pas??
A
hahaha que vous êtes cons
M
Quand je lis des trucs comme ça, j'ai l'impression que t'es là, devant moi, à poils.
Y
J'ai adore. Ptin la theorie des poissons. J'ai vecu en thon, je mourrais en thon.
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